[Article mis à jour le 08/09/2020]
Et si, au lieu de diaboliser les aliments que nous aimons tant manger mais qui, en excès, peuvent nuire à notre ligne, nous nous mettions à les apprécier avec cette modération tant souhaitée ?
Pourquoi cette bataille ?
Car là est le dilemme… en effet, dans la tête de nombreuses personnes désirant maigrir, la modération avec zéro restriction et zéro excès mais un juste équilibre n’est pas évidente. On a beaucoup entendu dire que pour perdre du poids, il fallait se restreindre, supprimer les féculents, c’est-à-dire le pain, les pâtes et les pommes de terre. Puis il y a eu la chasse au gras, faisant apparaître les beurres allégés, les fromages light et les yaourts 0%. Dans le passé, beaucoup de conseils diététiques étaient fondés sur des interdits, des restrictions, avec la promesse que le contrôle exercé sur nos désirs alimentaires allaient être récompensés par l’obtention de la silhouette de nos rêves.
Or, cela fait maintenant plus d’une décennie que les diététiciens (en tout cas ceux dont je fais partie) ont bien compris que le contrôle alimentaire excessif, les restrictions sans fin et les interdits étaient voués à l’échec. Bien entendu, il reste évident que ce type de régime très restrictif est efficace sur le court terme : les kilos s’envolent, la balance affiche un chiffre à la baisse, et les mensurations diminuent. Mais sur les moyen et long termes, le résultat disparaît : à force de privation et de déni du plaisir, l’envie revient à la charge, sous forme de raz le bol, de compulsions et de besoin de « se lâcher ».
Les interdits comme valeur d’(in)efficacité
De nombreuses personnes en font l’expérience, certaines sont abonnées à ce type de régime et font le « yo-yo ». On pourrait penser qu’à force de pertes et de reprises (plus importante) de poids, ces personnes en arrivent par elle-même à la conclusion que ce qui ne marche pas depuis des années et les mènent inlassablement à reprendre des kilos est inefficace. Elles devraient alors penser à changer de tactique et réaliser que le plaisir a des raisons que la raison ignore, et qu’il finira toujours par l’emporter sur les interdits. Il serait alors judicieux de s’orienter vers l’apprentissage de la modération… Oui mais… On voit défiler en cabinet des demandes telles que « Il faut être très strict avec moi ; Interdisez-moi le fromage car je ne sais pas en manger qu’un bout ; Je vais jeter tout ce qui me tente car je suis incapable de me contrôler ; Bannissez le sucre de mon régime car c’est mon ennemi… ».
Et en effet, comme l’a dit Saint Augustin « l’abstinence totale est plus facile que la parfaite modération ». Et elle donne des résultats… illusoires. Puis plus tard on entend : « Je n’y arrive plus, je ne comprends pas. Pourtant au début je m’en passais très bien mais là c’est plus fort que moi, je ne peux pas résister.» Et oui… Car c’est oublier notre nature humaine : derrière chaque interdit se cache une transgression. Plus nous posons des limites rigides, plus nous avons envie de les transgresser…
Alors, que faire ?
Il s’agit à mon sens de construire un équilibre basé sur de légers déséquilibres, qui permettront de ne plus éprouver le besoin de transgression. Ainsi, tous ces petits déséquilibres permettront d’éviter un déséquilibre bien plus grand et de respecter le besoin sous-jacent : le plaisir !
Certes, cela ne renvoie pas les promesses habituellement faites des régimes miracles, et je ne vous promets pas que vous allez vous débarrasser de cinq kilos en une semaine. Certes, il vous faudra peut-être plus de patience avant de constater les premiers résultats. En revanche, je vous garantie une réconciliation de bon sens avec la nourriture.
Je vous invite à « faire régime » en mettant du vrai beurre sur vos tartines mais en l’étalant bien, à continuer de manger des crèmes au chocolat en dessert mais deux fois moins qu’avant, à toujours manger des pâtes carbonara mais en diminuant la crème et en y associant des légumes, à continuer d’aller au restaurant mais en veillant à choisir un plat équilibré avant de choisir un bon dessert, de prendre l’apéritif entre amis en limitant les chips. Ne vous privez de rien tout étant vigilent sur tout. Rien de sert de trop manger et d’être excessif pour se priver ensuite, puis retomber à nouveau dans les excès.
Certaines personnes s’effraient à ce type de pensée, ceux sont celles qui n’ont pas essayé et préfèrent se priver de tout… Si vous mangez un carré ou deux de chocolat lorsque vous en avez envie, mais pas plus, vous ne renverrez pas cette envie au placard, au rang des frustrations. Et même mieux, si vous vous octroyez, selon vos propres critères (quoi, à quelle fréquence), des petites transgressions et du plaisir, alors vous ne vous ne mettrez plus en zone d’inconfort.
Arrêtons de stigmatiser « ce qui est bon » comme étant nocif pour la ligne.
Et apprenons à connaître les aliments : mincir doit se faire avec plaisir, pas forcément à la vapeur ou au court bouillon. Voici quelques plats équilibrés dont il seraient dommage de se priver, mais que la plupart des gens « au régime » évitent : lasagnes, souris d’agneau confite, chili con carne, hachis parmentier, gratin dauphinois, bœuf carotte, pot au feu, crêpe salée ou sucrée… Tout va dépendre de la recette, du type de matière grasse, des proportions, des ajouts inutiles et des quantités.
L’abstinence totale fait miroiter ce que la parfaite modération ne promet pas, et cette même abstinence est parfois plus facile à mettre en place, la modération nécessitant certains efforts et des prises de conscience. Le tout commence donc par un état des lieux de ses apports alimentaires, par la mise en lumière de ce qui pose problème, puis l’adaptation d’une stratégie permettant d’apporter une réponse en douceur. Tous les changements opérés devront tenir dans le temps, et doivent donc être intégrés avec douceur, car aucun organisme n’est fait pour subir de brusques changements, surtout s’ils sont source de frustration. Alors en avant, avec plaisir.
J’axe mes accompagnements sur l’écoute et la compréhension du mode de vie de mes patients. J’étudie avec eux leur degré de motivation, et les aide à appliquer le plus facilement possible les changements d’habitudes et d’organisation nécessaires, avec l’objectif que ce soit de manière définitive.